Histoire de chats

Publié le par Christiane Valdy

JAMAIS, un animal ne rentrera dans ma maison. J’ai assez de boulot comme ça, et les gens qui ont des animaux deviennent complètement cinglés. Ils en parlent sans arrêt et les chouchoutent plus qu’ils ne le feraient pour leurs propres enfants. Il y a des humains sur Terre pour lesquels je me plierai en 2, en 4 s’il le faut. Mais jamais pour un animal. Il faut nettoyer ses excréments, le laver, le promener. Oh non au grand jamais ! En revanche, j’aime les plantes qui poussent dans le moindre recoin de mon petit jardin et pendent aux murs. Parfois elles meurent. Peu importe, ça ne me remplit pas de tristesse, et vite une nouvelle ou plusieurs nouvelles remplacent la plante desséchée. Un animal c’est différent.

J’ai tenu ma promesse de ne pas avoir le moindre animal à quatre pattes chez moi pendant mon âge -moins un an-. Seuls quelques petits poissons ont été autorisés. L’aquarium se nettoyait tout seul, et il fallait juste verser de la nourriture une fois par mois. On pouvait partir en vacances et les laisser seuls sans problèmes. Quand ils sont morts, d’ennui vraisemblablement, l’aquarium a été donné à une amie. Cette amie avait des chats, au moins trois. Les poissons et les chats ne faisant pas très bon ménage, un chat a mangé un puis deux, puis tous les poissons. Et l’aquarium a été converti en un pot de fleurs.

Les animaux, c’est fait pour rester en liberté. Et je ne manquais jamais de pester contre les chats des voisins qui venaient tuer les oiseaux du jardin, faire leurs besoins devant ma porte, ou m’amener en tendre cadeau une souris morte. Mon arme : le tuyau d’arrosage pour les éloigner. Les chiens, c’est plus difficile à éloigner quand ils font leurs besoins dans le petit jardin de devant, ils ont l’air tristes. Alors je les laisse achever leur œuvre avant d’enlever leurs déchets avec un râteau. Marcher dans un excrément de chien et le transporter partout dans la maison, c’est vraiment dégoutant. Mais revenons aux chats.

Un jour... Il y a 13 mois maintenant, j’ai entendu des petits gémissements dans la chambre de ma fille qui venait passer le weekend à la maison. Je pensais qu’un oiseau était entré. Non, c’était une petite boule noire qui hurlait de faim dans un sac de sport, et qui se trainait à peine sur ses pattes de derrière pour essayer d’en émerger. Marianne, ma fille s’appelle Marianne, avait ramené clandestinement de Bananito sur, c'est-à-dire du bout du monde au Costa Rica, du lycée où elle enseigne, un petit rejeton d’à peine deux ou trois semaines qui serait mort de faim pendant les vacances scolaires.

Je n’apprécie pas les chats, mais de là à laisser un avorton mourir de faim, non ! Donc les recherches sur Internet ont commencé : Que donner à un chaton de 3 semaines ? Comment l’alimenter ? Cómo alimentar a su gatito ? Comment apprendre à son chat à être propre ? Et me voilà chez le vétérinaire proche de la maison pour demander des conseils. « Ce chat repartira avec toi à Limon après les vacances. », je disais à ma fille. Mais mon autorité n’est sans plus ce qu’elle était avant, et le chat n’est pas reparti à Limon. Il ne pouvait pas rester toutes ses journées seul, et il s’échapperait par la fenêtre sans vitre furent les arguments convaincants. Et me voilà donc avec un petit chat, obligée de m’en occuper, en train d’acheter des aliments, du sable et des jouets pour les chats, et me voilà convertie à mon insu en grand-mère de chat. D’abord il faut dire que ce n’est pas un vrai chat, il tient plus d’une jeune panthère que d’un chat. Ô combien de morsures avec ses jeunes dents pointues ? Le sang giclait régulièrement le long de mon avant-bras, et des hurlements et des insultes giclaient de ma bouche. Il ne faut surtout pas taper un chat qui mord. C’est écrit sur Internet. C’est la mère que lui apprend à ne pas mordre en le mordant. Mais puis-je mordre un chat ? Alors j’ai acheté un pistolet à eau pour me défendre. Une simple menace avec cette arme bleue après ou avant une morsure, et le chat part en courant à bonne distance.  J’ai enfin compris que Choco ( le chat s’appelle Choco, diminutif de Chocolate, en espagnol),  me mordait chaque fois qu’il avait faim, alors en tant que représentante, selon lui, de sa première mère nourricière,  je lui donnais à manger, et il a enfin compris que je n’aimais pas du tout être mordue, maintenant il me lèche les pieds ou me grattouille les jambes quand il a faim. Bien sûr si je suis occupée et n’obéis pas à la seconde j’ai droit aux dents.  Et quant aux repas de Monsieur, c’est ce qu’il veut manger. Surtout pas une simple gamelle de croquettes sortie du paquet du supermarché. Ce serait trop facile. Memo (le grand-père du chat) qui ne cuisine jamais pour la famille, lui fait cuire des cuisses de poulet, le plat préféré. Moi c’est plus simple, soit de la viande hachée crue, soit des boites pour chat, parfois des boites de thon. Le chat réclame et choisit son menu, ce qu’il veut, mais pas ce qu’on lui offre. Une ruine financière, et du gaspillage.

Choco a grandi, on l’a fait vacciner contre tout, on lui a fait couper ses organes génitaux pour qu’il se calme et ait le droit de sortir dans le jardin. Il est heureux de gambader, de ramper ou de se cacher dans les herbes, une vraie panthère noire. Parfois il disparait pendant quelques heures, perdu en haut d’une toiture, dans un grand arbre, ou qui sait où ? On le cherche avec angoisse , et il revient. Où était-il ? La communication est difficile avec un chat. Et notre interrogatoire demeure sans réponse.

Allez, je vais avouer, il y a une chose que j’aime en Choco. Il me regarde avec admiration quand je fais la vaisselle, quand je prépare le repas, passe le balai. Il adore me voir dans la cuisine. Dans la salle de bain, pareil, si la porte n’est pas bien fermée, il entre discrètement et m’admire sous la douche.

Dans le bureau, je l’apprécie moins. Choco a l’art de passer derrière l'écran de l’ordi, de faire le tour en marchant sur les touches du clavier, de s’assoir sur la touche « On » de l’imprimante, et d’attendre qu’une feuille sorte. C’est son jeu préféré.

Il faudrait consulter un psychologue pour chat. Il parait que ça existe. Ne riez pas ! Choco a une phobie : le téléphone.  Je n’ai pas le droit de répondre à un appel téléphonique, il me saute chaque fois férocement dessus pour attraper la bête noire à laquelle je parle. Alors je dois m’enfermer dans mon bureau, me mettre à l’abri du monstre pour pouvoir papoter tranquillement.

C’est ce que j’ai fait tout à l’heure quand une amie m’a téléphoné. Mais après avoir fini ma conversation j’ai ouvert la porte du bureau, plus de chat. En général il m’attend devant la porte fermée. Je l’appelle, le siffle. Rien. Je vérifie les portes et les fenêtres sont bien fermées. Il n’a pas pu sortir. Où est-il passé ? Je monte à l’étage supérieur ? Rien sur le lit, rien sous le lit. Quel emmerdeur ! Où est-il passé ? Je regarde dans mon placard, dans la chambre de Camila, dans la cuisine, sur chaque chaise, sur et sous mon lit. Rien. J’ouvre le frigo. À ce bruit en général le chat arrive immédiatement. Non. Rien. Je m’approche du canapé pour voir s’il n’est pas sous le journal, il adore se cacher sous les journaux qui trainent. Rien. Mais soudain, une petite patte noire sort doucement de dessous le canapé et se met à me caresser le pied. Trouvé. Pris au piège de la tentation de mes pieds nus qu’il adore mordre. Comment est-il parvenu à passer sous ce canapé ? Mystère.

Je lui dis de sortir. Il va s’étouffer. Sors de là ! Rien. L’obéissance n’est pas sa qualité première. Chaque fois que je m'approche, Choco sort sa patte pour attraper mon gros orteil. Je renverse alors ce lourd canapé. Aïe mon hernie discale !. Sors d’ici.  Et là, Choco file se cacher dans la salle de bain, je l'attrape. Tous les soirs le chat fait son cirque pour ne pas qu'on le couche, tel un enfant. Dans sa pièce. Porte fermée ! Tranquille.

Bien d’autres anecdotes à raconter sur ce fauve qui m’a domestiquée, ce sera un autre jour.

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